Aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le nombre des années…

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a)    Acte I – Scène 1

Un groupe d’enfants d’une dizaine d’années sont assis et discutent. L’un d’eux qui semble être le leader prend la parole…

  • Minla’a : Les amis, parlez doucement. Pour la première fois que l’on nous autorise à être dans l’Aba des adultes, respectons le lieu. Respectons-nous !
  •  Enfant 1 : Justement, si nous sommes ici, c’est parce que nous allons devenir des hommes.
  • Minla’a : après une longue période d’initiation dont seule la première étape commence ici.
  • Enfant 2 : Dis donc, aka, le maitre d’initiation n’est pas encore arrivé. Profitons de nos derniers moments d’enfance. Après ça, nous devrons nous comporter en grands.

Espiègle, il court et va s’asseoir sur un siège qui semble être le trône du chef. En deux enjambées puissantes, Minla’a le rejoint et lui assène une gifle monumentale. Les larmes aux yeux et la main sur la joue, le battu réplique

  • Enfant 2 : Tu me gifles parce que je me suis assis sur la chaise de ton père ?
  • Minla’a : je te gifle parce que tu ne respectes rien. Je l’aurais fait, même si c’est ton père qui avait été chef. Mes amis, ce que nous allons faire est une grande responsabilité. Et je crois savoir que les épreuves initiatiques seront d’envergure. Restons concentrés.
  • Enfant 2 : Tu nous parles comme si tu étais déjà notre chef.
  • Minla’a : On ne devient chef qu’après des cérémonies traditionnelles. Il n’y a pas de cérémonie pour être un leader. Vois-tu un autre ici qui puisse être notre leader ?
  • Enfant 2 : Non.

Entrent cinq autres enfants. Ils tiennent chacun un paquetage. Alors qu’ils veulent aller s’asseoir chacun dans son coin, Minla’a tend la main. Les quatre premiers enfants, visiblement à contrecœur, lui remettent leur paquet qu’il fait déposer avec d’autres paquets déjà rangés. Le cinquième refuse …

  • Minla’a : Owoutou, donne ici le paquet que ta mère a fait pour les premiers jours de notre initiation.
  • Owoutou : Chaque mère connait son enfant. La mienne sait que je raffole de la pâte d’arachide faite précisément de la manière qu’elle le fait. Chaque mère se bat et se prive pour donner le meilleur à ses enfants. C’est ce qu’a fait ma mère. Il n’y a aucune raison que je donne mon Nnam Owondo et mes Bobolo à quiconque. Aucune. Je ne le ferai pas.
  • Minla’a : Tu parles bien, et tous ici, nous te remercions de louer les efforts que ta mère, comme les autres font. Je vais cependant te dire deux choses.
  • Owoutou : Ô leader bien aimé, parle.
  • Minla’a : L’ironie ne te sied pas. La première chose est que nous allons faire plus d’une lune, presque 40 jours, en isolation. Ta mère t’a-t-elle donné de quoi manger quarante jours ?
  • Owoutou : Non
  • Minla’a : ça veut dire que tu mangeras ses mets succulents pendant trois jours. Tes camarades ici présents également. Ceux dont les mères ont été moins pourvues ou qui cuisinent moins bien que ta mère en viendront naturellement à t’envier. Et toi, peut-être à envier les autres. Penses-tu que c’est le meilleur moyen de créer un esprit de corps qui nous permettra d’une part de tenir solidairement pendant quarante jours, et d’autre part de construire le corps des notables que nous serons demain et qui devra œuvrer uniquement pour le bien de notre village ?
  • Owoutou : C’était cela la première chose ?
  • Minla’a : C’était cela. Nous mangerons nos paquets tous ensemble, sans discrimination, dans un esprit de partage. Toi comme les autres. La seconde chose était que si malgré ce que j’ai dit, tu t’obstines, alors je vais te prendre le paquet de force.
  • Owoutou : de force ?

Sans mot dire, Minla’a se lève et vient se placer devant Owoutou. Au bout de longues secondes, Owoutou va déposer son paquet auprès des autres paquets et vient s’asseoir.

  • Minla’a : Bien. Avant que le maître n’arrive. Est-ce que l’un d’entre vous sait à quelle sauce nous allons être mangés ?
  • Enfant 1 : Je crois qu’il y aura la lutte, le Messing. Il va nous initier et nous combattrons pour savoir qui est le plus fort d’entre nous. Je sais déjà qui sera le vainqueur.

Rires dans l’assistance.

  • Minla’a : celui qui part victorieux avant le combat risque bien d’en ressortir le dos couvert de poussière.  Il y aura quoi d’autre ?
  • Owoutou : Je pense qu’il y aura la chasse. Mon grand frère m’a dit qu’on les avait obligés à ramener un porc-épic. Ils avaient dû le traquer pendant trois jours et deux nuits.
  • Minla’a : Qui sait réciter sa généalogie, son Endan ?

Silence assourdissant.

  • Minla’a : Personne ? je crois que ce sera l’une des premières épreuves. Celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut pas savoir où il va.
  • Enfant 2 : toi tu connais le tien ?
  • Minla’a : Je suis Minla’a, fils de Foumane Minla’a. Foumane est le fils Minla’a mi Sou’Ou lui-même fils de Sou’ou Azo’o. Azo’o Mvindi était son père et son père à lui était Mvindi Alo’o. Son père Alo’o Ndi’a avait pour père Ndi’a Messo’o. Et le père de Ndi’a était Messo’o me Mfa. Mfa Adjeme était son père et Adjeme Nguele était son père à lui. Nguele Edjodjomo a accouché Adjeme Nguele et Edjodjom a accouché Nguele Edjodjom. Edjodjom est issu des temps immémoriaux d’Ondjabo’a.
  • Ensemble des enfants : Bravo !
  • Minla’a. C’est relativement facile. Nous avons un ancêtre commun dans ce village, Mvindi Alo’o qui était parti de chez son père pour venir créer son village. Il suffira pour chacun d’entre vous de retrouver sa lignée jusqu’à lui. Je vous aiderai pour remonter à Edjodjom. Chuut, voilà le maître d’initiation…

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Acte I, scène 2

2 réponses à « Aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le nombre des années… »

  1. Avatar de La sorça
    La sorça

    Très bonne initiative je suis entrain de voir une méchante scène bravo

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  2. Avatar de Rodrigue nyo'o voundi
    Rodrigue nyo’o voundi

    Très édifiant ce que l’on ignore nous jeunes notre généalogie félicitation aux initiateurs de cette œuvre littéraire

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